Ma rencontre avec l’eau au travers de ma démarche artistique 

 

L’homme et l’eau, indissociable lien.

 

 

Dans le monde, 1 personne sur 3 n’a pas accès à l’eau potable. Près de 4 milliards de personnes ne bénéficient pas de conditions sanitaires convenables (OMS 2013). Seulement 3% de l'eau de la planète est douce, ce qui en fait un enjeu géostratégique et commercial important (CNRS). C’est l’un des droits humains fondamentaux reconnus par l’ONU dans sa résolution de juillet 2010. La quasi-totalité des pays du Sud a privatisé la gestion de l'eau. On supprime ainsi le droit à l'eau pour en faire une marchandise qu’il faut pouvoir « acheter » (Cetim).

 

C’est la nécessité de rationaliser la répartition de l’eau qui donna dès l’Antiquité les prémices de l’administration et initia une première gestion des ressources en eau. Depuis un siècle, elle est devenue le produit le plus largement distribué, le plus contrôlé, soumise à un appareil administratif et réglementaire complet et complexe dans grand nombre de pays.

 

Si l’eau structure les activités humaines au fil des siècles, la connaissance de ses propriétés devient un outil de progrès majeur dans les sociétés modernes, servant de levier aux révolutions industrielles des pays en marche vers le développement.

 

Depuis vingt ou trente ans, on assiste à un retour vers son rôle originel : maîtrisée, l’eau redevient structurante. Elle recommence à commander l’Homme, en particulier en occident, car sa pollution ou sa disponibilité insuffisante font prendre conscience qu’il doit adapter sa gestion à la nature et à sa protection. L’agriculture et l’industrie tentent ainsi de réorienter leurs pratiques pour limiter la dégradation de ce bien précieux. Ainsi se fait jour une reconnaissance du pouvoir de l’eau qui suscite désormais une remise en ordre, réoriente le travail, les loisirs et les rythmes du quotidien. Et sur la planète, dite bleue, ou tant d’humains n’ont pas accès à l’eau potable, le « concert » des nations de sommets en colloques cherche à trouver la juste organisation de l’eau, celle qui concilierait l’accès à l’eau pour tous et les impératifs de développement social et économique pour les pays les plus défavorisés comme ceux qui s’ouvrent au progrès économique et social.

 

Depuis toujours mon travail s'articule et se développe autour de la notion du vivant. Dans mon exercice de création je cherche à mettre en évidence les énergies de la vie et les interconnections qui s’établissent. J’ai procédé par grossissements successifs en m’efforçant d’analyser les cycles du vivant en les reproduisant par des jeux de duplication. Avec la répétition des gestes et de motifs associés à la notion d’altérabilité, l’œuvre se transforme, se complexifie, s’enrichie. Ainsi sont nées des séries : peintures (barres, énergie, flux, aspirations d’eau…), sculptures (stèles…), collages (« rythmes, lumière, écritures »...). Peu à peu ces recherches m’ont amené à focaliser sur la lumière en tant que source d’énergie première, puis sur l’eau, élément fondamental à la vie. C’est ainsi, dès 2009, que j’ai fixé mon regard d’artiste sur l’élément eau avec l’œuvre MM1, miroir mouvant.  L’immense miroir fractionné est mis en mouvement par l’action du vent et donne l’illusion au spectateur d’être face à une étendue d’eau verticale, scintillante et traversée d’ondes. Le reflet se déstructure et joue avec le réel et la lumière. Les éclats lumineux, le mouvement et le fractionnement de l’image hypnotisent le spectateur comme face à un miroir aux alouettes.

 

Avec cette œuvre je voulais nous interroger sur notre perception du réel, sur notre histoire et nos origines. Mais également s’interroger sur l’origine et l’énergie de la vie, sur la lumière et l’eau, et mettre en évidence par ce grand mix d’images fragmentées ponctuées d’éclats lumineux l’interconnexion du vivant. 

 

 

Puis sur l’œuvre Reflets réalisée également en 2009 où là l’eau porte et dynamise le dispositif.

 

Cette création artistique a fait émerger un questionnement plus large sur notre époque contemporaine. Les installations, les peintures et les vidéos que je conçois intègrent dès lors les problématiques sociétales et environnementales : communication, langage, perception, temps, vie, mort, immigration, frontières, bouleversements climatiques, quête de l’eau potable… Alors que notre civilisation n’a de cesse de contrôler, segmenter, réduire, je vois les singularités du vivant comme universelles, portant ma vision d’un monde riche et complexe, foisonnant de vies interconnectées et essentielles les unes aux autres.

 

 

 

 

C’est en 2011 que l’eau prend toute sa place dans mon travail afin de répondre à un concours pour les Talents Contemporains de la Fondation François Schneïder à Wattwiller (France). Cette fondation qui a pris corps dans les anciens ateliers des sources thermales de Wattwiller se consacre à aider des artistes plasticiens qui travaillent sur le thème de l’eau. Ainsi est née l’œuvre Source de vie avec laquelle j’ai été finaliste. Je travaillais sur des anamorphoses de mots où une même structure générait deux mots : un mot ombre et un mot lumière par des jeux de miroirs. C’est progressivement que l’idée m’est venue de faire jouer à l’eau cet effet miroir et de renvoyer via des reflets l’anamorphose de « SOURCE » : « De VIE ». En laissant l’eau des gobelets s’évaporer disparait peu à peu « de vie » : plus d’eau, plus de vie.

 

Source de vie pour Nuit Blanche Paris 2014
Source de vie pour Nuit Blanche Paris 2014

Dès lors je n’ai eu de cesse de travailler avec cet élément. Ainsi sont nés une multitude d’autres travaux, portés ou activés par l’eau, en utilisant toutes sortes de médiums :

 

 

-      Le grand manège, projet d’installation monumentale, 2012-2016

 

-      Acqua Alta : les hautes eaux, sculpture, 2013

 

-      Remember me ! , vidéo, 2013

 

-      Toxic et O, lavis sur papier, 2014

 

-      Aspirations d’eau, peintures, 2014-2015

 

-      Lumières de sirènes, installation, 2014

 

-      Charriées, tableau sculpture, 2015

 

-      Watershed, ligne de partage des eaux,  sculpture-installation, 2015-2016

 

 

Avec le projet Le grand manège c’est un château d’eau qui est le support de l’œuvre et qui porte un questionnement sociétal sur les ouvriers viticoles de la commune de Saint-Julien-Beychevelle ainsi que sur la problématique de l’accessibilité à l’eau. Je mets en scène des silhouettes miroirs d’ouvriers viticoles debout sur des tonneaux dorés à l’image des grands manèges de balançoires. Nous sommes sur la prestigieuse appellation des vins de Saint-Julien. Il va de soi que ces tonneaux font référence à ce vin. Mais en est-il réellement ainsi. La structure porteuse est un « château » d’eau. Et demain des deux éléments eau et vin lequel sera le plus précieux ?

 

Projet Le grand manège
Projet Le grand manège

Acqua Alta : les hautes eaux est une œuvre de commande directe de M. Bernard Magrez. Ce magna du vin et grand collectionneur a créé en 2011 une fondation d’art contemporain à Bordeaux : l’Institut Culturel Bernard Magrez. A l’image de la Villa Médicis à Rome il y reçoit des artistes en résidence, il y propose des expositions thématiques ainsi que la présentation de sa collection d’art (j’ai été résident pendant un an à l’institut).

 

 

Bernard Magrez est un inconditionnelle de la ville de Venise. Et c’est un beau matin de février que je reçois son appel me demandant si je serais intéressé pour créer une œuvre sur le thème de Venise. Son seul impératif : utiliser une véritable gondole vénitienne ! J’ai immédiatement dit « oui » et me suis lancé dans ce nouveau projet.

 

J’ai eu envie de créer un symbole fort de la fragilité et de la force de cette ville emblématique. Construite dans une lagune sur des fondations en bois la ville de Venise est soumise aux flux et reflux de la mer. Tous les ans, d'Octobre à Avril, Venise est confrontée au problème de l'acqua alta.

 

Ce sont des marées d'une amplitude exceptionnelle qui, en s'engouffrant par les trois passes d'entrée de la lagune, provoquent l'inondation de la ville.

 

Elles sont le résultat de l'action conjuguée de différents phénomènes naturels : les grandes marées, les variations de la pression atmosphérique et la poussée des vents (en particulier le sirocco), qui associés à l'affaissement progressif du niveau de la ville, engendre des marées exceptionnelles.

 

 

 

Mais, l'activité humaine est également responsable des inondations : le développement économique induisit le creusement de chenaux de grande profondeur (jusqu'à 15m) à l'intérieur de la lagune, pour permettre aux bateaux de forts tonnages de remonter, depuis la mer jusqu'au port maritime de Venise, au complexe pétrolier de Porto Marghera ou au terminal de San Leonardo. Ces "autoroutes" pour les courants marins, et notamment lors des fortes marées, ont profondément déséquilibré l'écosystème fragile de la lagune, provoquant des inondations de plus en plus fréquentes. Auquel on doit ajouter l'abandon des barènes non entretenues qui, peu à peu, s'érodèrent et ne jouèrent plus leur rôle de régulateur des marées et courants marins.

 

La haute-marée est un "spectacle" très apprécié des touristes qui font des photos souvenir pour raconter l’anecdote « typique » à leur retour sur « la terre ferme » ; les Vénitiens, quant à eux, cohabitent avec résignation et philosophie avec ce phénomène qui perturbent leur vie quotidienne et les activités économiques.

 

Acqua-alta : les hautes eaux, installation, 2013 dim. 11,30m x 1,44m x 2,20m  Véritable gondole vénitienne, mât en acier peint
Acqua-alta : les hautes eaux, installation, 2013 dim. 11,30m x 1,44m x 2,20m Véritable gondole vénitienne, mât en acier peint

Avec la vidéo Remember me !  c’est une eau mémoire et une eau lien que je mets en mouvement. Mes influences sont une combinaison entre les résultats des travaux du Professeur Luc Montagnier, prix Nobel de médecine en 2008, qui a repris et démontré les travaux de Jacques Benveniste sur la « Mémoire de l’eau » et le sentiment de connexion appelé « sentiment océanique » qui se rapporte à l'impression ou à la volonté de se ressentir en unité avec l'univers. Ainsi je percevais un enchainement d’évidences : l’océan originel d’où provient le vivant, vivant porté par l’eau depuis la nuit des temps, se développant et se complexifiant, créant des structures corps qui, comme de peur de quitter cette eau-mère, emmenaient l’eau avec eux. Tout ce processus de réflexions jusqu’à visualiser le ressac incessant et immuable depuis des milliards d’années sur terre mais déjà en mouvement depuis bien plus longtemps dans l’espace et l’univers via les comètes… D’où l’idée de filmer l’océan ici, chez moi dans le bordelais, en plongé et suffisamment près pour que l’image devienne courbe et donner l’illusion d’une vision de la terre vue de l’espace. L’écume devient alors au fil des images des pays, des continents ou la stratosphère parcourue de nuages… Accompagnée d’une bande son « échos du monde » qui nous donne l’impression et la capacité de pouvoir entendre l’ensemble de la vie terrienne à un instant donné cette vidéo donne à voir un monde d’eau, ou tout le vivant y serait lié et interconnecté par elle.

 

Avec les lavis de la série Toxic et O j’ai essayé de rendre la richesse, la complexité et la fragilité de l’élément eau aux travers des dernières gouttes d’eau présentes dans des verres. Je me suis interrogé en observant les traces anodines d’eau après séchage des verres retournés sur les éviers de cuisine sur notre facilité d’accès à une eau potable de qualité. C’est alors que l’idée m’est venue d’associer ces dernières gouttes à une toxicité potentielle future. Effectivement, comme sur une scène de crime retrouver le poison dans ces traces rondes et communes. J’ai alors dilué des produits chimiques toxiques dans de l’eau, rempli de quelques gouttes des verres avec cette eau polluée et retourné ces verres sur des feuilles de papier. Les gouttes se répandent en cercles en suivant le rebord des verres puis peu à peu les produits corrosifs utilisés attaquent la couleur des feuilles de papier. D’autres produits ont teinté les papiers blancs… Peu à peu j’ai remplacé les toxiques par de la peinture diluée et mis en avant la beauté plastique et la complexité de ces traces. J’ai laissé la place à une eau belle et vivante qui mue de ses propres aspirations organisait et mélangeait les couleurs de façon extrêmement subtile et délicate. Puis j’ai utilisé des supports moins perméables et ainsi l’eau s’infiltrait et donnait naissance à une cartographie riche et complexe qui se révélait sur l’envers des supports (toiles perméables). J’ai nommé cette évolution Aspirations d’eau.

 

Toxic I, 2014. Dimensions 50cm x70cm et Toxic II, 2014. Dimensions 50cm x70cm
Toxic I, 2014. Dimensions 50cm x70cm et Toxic II, 2014. Dimensions 50cm x70cm
O, n°28, détail, 2014
O, n°28, détail, 2014
Aspirations d’eau II, V, IV, III, XII, XVIII, 2014. Dimensions 60cm x60cm
Aspirations d’eau II, V, IV, III, XII, XVIII, 2014. Dimensions 60cm x60cm
Aspirations d’eau XXI, 2015. Dimension 93cm x93cm et détail
Aspirations d’eau XXI, 2015. Dimension 93cm x93cm et détail

Pour l’installation Lumières de sirènes c’est l’horreur de ces milliers de migrants anonymes morts noyés dans la méditerranée qui est à l’origine de ce travail. Cet œuvre fait partie d’un ensemble de travaux sur le drame de l’immigration clandestine Afrique-Europe. Portée par l’eau Lumières de sirènes développe deux axes de réflexion : l’accessibilité à l’eau potable et l’Europe vue comme un miroir aux alouettes.

 

Au sol le continent Africain. Il est composé de centaines de gobelets d’eau. Il est éclairé par une lampe depuis le plafond. Sur le rideau derrière des centaines de ronds lumineux. L’ensemble de ces ronds créé l’Europe. Suivent le remplissage des gobelets un reflet est projeté sur le rideau. Le continent africain au sol génère par des jeux de reflets à la surface de l’eau des gobelets le continent européen sur le rideau (même procédé technique de reflets que pour l’œuvre Source de vie). Un ventilateur balaye l’espace d’un léger courant d’air troublant la surface d’eau des gobelets. Ainsi les reflets sont à leur tour balayés d’ondes, troublés comme un mirage.

 

Lumières de sirènes pour Nuit Blanche Paris 2014
Lumières de sirènes pour Nuit Blanche Paris 2014

Nous sommes aux prémices de grands mouvements migratoires Afrique – Europe. La survie, un ailleurs plus prospère et plus sûr, voilà ce que des milliers de migrants clandestins essayent d’atteindre. Ils se lancent à corps perdus dans ce parcours du combattant qui de pièges en désillusions prendra la vie à un grand nombre. Pour les rescapés pas de retour en arrière possible. Avancer, toujours avancer. Tragiques histoires contemporaines d’anonymes sur les pistes de l’Eldorado, d’africains qui ne souhaitent qu’une seule chose pour eux et leur famille : vivre.

 

Charriées I est issue d'un motif de vase séchée et craquelée
Charriées I est issue d'un motif de vase séchée et craquelée

Pour le travail Charriées je fais un parallèle entre les craquelures naturelles  je m’intéresse aux planches de bois flottés échouées sur la rive de l'estuaire de la Gironde à Pauillac. Je vois là l’estuaire comme un lien du territorial. 

 

 

 

Des planches de bois charriées par les eaux boueuses de l'estuaire, descendent et remontent devant la ville de Pauillac au grès des marées, en migration pour certaines depuis les Pyrénées, avant de s'échouer sur la rive. Glanées, stockées puis découpées elles vont recomposer un motif craquelé de vases  estuariennes desséchées. Lier des trajectoires, des histoires, des temps et des vies, en assemblant ces lambeaux de planches de bois et tenter de recomposer une histoire commune. L’absence d’eau empêche ce processus et isole ces matières sœurs par des craquelures-frontières.

 

Watershed ligne de partage des eaux, travail en cours, 2015-2016
Watershed ligne de partage des eaux, travail en cours, 2015-2016
Les pays en creux comme des creusets
Les pays en creux comme des creusets
L'Allemagne
L'Allemagne

Pour le projet de sculptures-installation Watershed, ligne de partage des eaux (en cours) je vois les pays du monde comme des creusets. Dans un premier temps je réalise ce travail en papier et peinture. Dans un second temps et suivant les possibilités techniques je souhaiterais refaire ce projet en céramique peinte afin d’être au plus proche de l’idée de contenants humains (bols, assiettes, plats…).

 

Ce projet questionne sur l’accessibilité à l'eau potable qui est un enjeu majeur de développement durable. En parallèle il interroge la notion de frontière et d’appartenance territoriale en la confrontant avec mes perceptions du vivant. L’eau étant vue comme un lien inter-vivant primal et en associant les aspirations de l’eau aux aspirations humaines.

 

 

Sanctuaire, projet d’installation, 2015-2016.

 

Projet pour le concours des Talents Contemporains 2015 de la Fondation François Schneïder.

 

A l’heure de la question du réchauffement climatique et de ses répercussions sur la vie sur terre, entre autre par rapport à l’accessibilité à l’eau douce, ce travail renvoie aux origines sacrées de l’eau et à une vision écoresponsable de son accessibilité et de sa préservation.

 

La genèse du projet est l’association de deux mythes, La Fontaine druidique de Bernos à Saint-Laurent-en-Médoc  et l’Arbre Fontaine de l’île d’El Hierro aux Canaries - El Hierro est 100% autonome énergétiquement en énergies renouvelables.

 

Cette œuvre a pour volonté de nous ramener à des valeurs élémentaires envers l’eau, tout comme au premier temps de l’eau comme le défini André Guillerme dans son ouvrage « Les Temps de l’eau ». Selon lui se succèdent depuis la Bas-Empire Romain à nos jours 4 temps de l’eau (étude réalisée sur les villes du nord de la France). Le 1er temps pose l’eau en élément sacré : cultes druidiques, vertus thérapeutiques, en même temps que se développe les premiers réseaux hydrauliques romains qui recèlent des ordres sacrés. Le 2nd temps, du Xe au XIVe siècle, exploite la dimension mécanique de l’eau avec le développement de l’artisanat selon la dentelle de ces « petites Venise » que constituent les nouvelles villes passionnées de leur hygiène (étuves, hôpitaux, égouts) et économes de leur énergie (moulins). Du XIVe au XVIIIe siècle, 3ième temps, l'eau stagne. La putréfaction gagne et un dépeuplement l'accompagne : la ville se perd dans ses miasmes – utilise la fermentation pour développer une nouvelle économie. 4ième temps, du XVIIIe à nos jours la révolution industrielle promeut les valeurs de l'hygiène active et rend à l'eau sa puissance : la nouvelle chimie, l'hydraulique favorisent une vision purifiée des problèmes. L'eau s'est   réveillée   et    coule   dans   des tuyaux, cachée, propre et contrôlée, tandis que les tourbes urbaines et les égouts s'enfoncent et disparaissent.

 

L’idée ici est de ramener à la surface cette eau source du vivant, visible et étincelante, dynamique et chantante, s’écoulant pure et cristalline d’un sanctuaire de pierre. Le mur circulaire en pierre sacralise l’eau qui s’écoule de son enceinte. De par sa hauteur (2 mètres)  il empêche le spectateur de voir ce qu’il s’y passe accentuant le mystère qui s’en dégage. Renforcé par la porte en bois entrouverte vers l’intérieur, inaccessible du fait du bassin qui se forme à sa sortie, qui laisse entrevoir et sous-entendre que le lieu est entièrement habité d’eau. Pourtant un arbre s’en dégage ! Le lieu devient alors symbolique et sacré. L’arbre évoque l’arbre sacré d’El Hierro, un Garoé ou arbre fontaine, qui avait la particularité de capter l’eau de la brume de cette île semi-désertique et de la restituer en pluie à son pied. Egalement il apporte tout le symbolisme de l’arbre dans sa capacité à désigner, à signifier, voire à exercer une influence en tant que symbole. L'arbre en général est symbole (de l'homme, du cosmos, de la vie...), et chaque arbre en particulier est un symbole (le chêne symbolise la majesté, l'aulne, l'humilité). Les textes des troubadours, des conteurs et des poètes chantent l'arbre comme l'axe du monde, la flamme de vie, le pont du ciel, l'image de l'éternelle vigueur. De par sa verticalité, l'arbre est le lieu sacré où le ciel s'enracine à la terre. L'arbre met en relation les trois niveaux du cosmos. L'arbre est le symbole par excellence de la vie en perpétuelle évolution. Le déroulement de son cycle annuel l'associe naturellement à la succession de la vie, de la mort et de la renaissance. On rencontre des arbres sacrés, des rites et des symboles végétaux dans les traditions populaires du monde entier, dans les métaphysiques et les mystiques de tous les temps, des époques archaïques jusqu'à nos jours. Parfois, l'univers est représenté par un arbre géant ; dans d'autres traditions, l'humanité naît d'un arbre. L'arbre est toujours associé à ce qui est vivant et créateur. L’association arbre-eau transcende la magie du lieu, la magie de cette source fantastique point de départ d’une nature mère, d’une eau de vie, d’une eau sacrée.

 

Gravure de l’arbre Fontaine d’El Hierro. Blason de l’île d’El Hierro. Fontaine druidique de Bernos en médoc
Gravure de l’arbre Fontaine d’El Hierro. Blason de l’île d’El Hierro. Fontaine druidique de Bernos en médoc

Les glaces du Kilimandjaro, projet d’installation, Résidence à Arusha en Tanzanie, 2016.

 

La disparition totale des glaces du Kilimandjaro en Tanzanie est annoncée pour 2030 !

 

 

La fonte des glaciers est devenue une image emblématique du réchauffement global de notre planète. La hausse des températures peut modifier la végétation qui nous entoure, mais il est très difficile de percevoir ces changements sur les paysages. En revanche, un grand glacier qui se réduit comme peau de chagrin marque davantage les esprits et fait prendre conscience de l'influence du climat sur le monde.

 

Le Kilimandjaro est un site emblématique de l’Afrique. Il en est le plus haut sommet (5892m). Le réchauffement climatique mondial affecte la pérennité de ses glaciers par raréfaction des chutes de neige. La déforestation au pied du Kilimandjaro accentue également ce phénomène.

 

 

 

 

 

Au pied et sur les pentes du Kilimandjaro poussent de grands arbres, qui eux-mêmes couvent des caféiers et des bananiers. Ce système traditionnel de culture, appelé méthode Chagga, fait vivre plus d’un million de personnes. Mais dans les années 1990, le cours du café s’est effondré et les habitants se sont tournés vers le commerce du bois.

 

Des milliers d’hectares ont été arrachés, transformant des forêts entières en désert. La température a crû de trois degrés, les pluies ont diminué de 20%.

 

L’œuvre est constituée d’un patchwork de tissus suspendu au-dessus d’un sol en terre glaise.  Le fond du « cône » en tissu est tapissé à l’intérieur d’un revêtement isotherme.  Tous les jours un seau de glace est déversé dans le cône. La glace fond petit à petit est goutte sur la terre. A cet endroit la glaise reste humide et ne craquelle pas. Quelques graines de végétaux des steppes tanzaniennes s’y développent comme autour d’une source. Au-delà, la glaise se fissure progressivement se transformant en zone désertique.

 

D’eau si loin que je me souvienne, installation vidéo, 2016

 

 

Projet de résidence à la Villa Kujoyama de Kyoto 2017.

 

Projet d'installation vidéo "D'eau si loin que je me souvienne"
Projet d'installation vidéo "D'eau si loin que je me souvienne"

Le ressac de la mer génère au fur et à mesure de la marée descendante de légers bourrelets de sables marquant ses limites sur la plage. Des lignes subtiles et ondulantes sont ainsi formées sur le sable en parallèle du trait de côte. Filmées en plongée et en traveling, ces lignes deviennent à l’écran un déroulé de courbes qui pourront être interprétées comme des modulations sonores.

 

Dans la continuité de ma vidéo Remember me ! (https://vimeo.com/97439291) qui met en avant une eau « mémoire » à l’échelle du monde j’ai envie de faire entendre de ces lignes de sables une histoire sonore du pays concerné : le Japon. Cette histoire est révélée par les sonorités de pratiques ancestrales comme actuelles au travers de l’élément eau. Comme si l’eau qui avait servi aux cérémonies, aux rites, à la vie quotidienne en cuisine, à l’intimité d’un bain sento ou onsen… avait gardé une mémoire sonore de ces faits ; puis suivant ses pérégrinations dans des rigoles, des conduites, des ruisseaux ou des rivières elle continuait à se charger des sons environnants jusqu’à atteindre la mer. Ces traits de sables gravés sur la plage seraient tels les sillons d’un disque vinyle. Ils formeraient un montage sonore restituant l’histoire de cette eau, donnant à entendre son chant, celui de la vie quotidienne japonaise à travers elle.

 

Des collaborations avec des artistes et des créateurs japonais comme des résidents à la Villa Kujoyama dans le domaine du son et de la vidéo me seraient précieuses : dans un premier temps pour réaliser la prise de son ; dans un deuxième temps pour la prise d’images et le montage visuel ; dans un troisième temps pour le montage sonore final.

 

La prise de vues se fera en travelling sur la plage. Pour assurer la stabilité et la distance avec le sol la caméra est placée sur un chariot à gros pneumatiques au bout d’une perche filmant en plonger. Le chariot est poussé en vitesse constante avec une perche par un opérateur. Il est aussi possible d’utiliser un charriot sur rails en aluminium. Tout ce matériel se loue très facilement et n’est pas excessif.

 

Les vidéos seront  d’une séquence de moins de cinq minutes, lues en boucle infinie (manipulation en postproduction  pour raccorder les plans de début et de fin).

Une grande richesse d'ambiances sonores autour de l'élément eau
Une grande richesse d'ambiances sonores autour de l'élément eau

La prise de son se fera directement sur site. L’ambiance sonore va déterminer deux  types de situations de prise de son :

 

  1. La source sonore est ponctuelle et est émise dans un environnement plutôt calme : une personne parle ou un objet émet un son bien localisé. Exemple : on enregistre un chant d’oiseau dans un lieu isolé, un musicien seul dans une pièce …
  2. La source sonore est « large » et agit comme un panorama sonore. Exemple : on enregistre une ambiance urbaine : il n’y a pas de son qui se détache en permanence mais un ensemble de sons de provenances diverses, avec de temps à autres un son plus dominant se déplaçant dans l’espace.

 

Ceci va déterminer le type de microphone à utiliser pour réaliser  la meilleure prise de son possible : omnidirectionnel ou unidirectionnel.

 

 

Les sons seront enregistrés sur un enregistreur numérique. L’ensemble de ces sons seront par la suite montés en s’inspirant des modulations des lignes de sable du travelling vidéo (subtiles combinaisons et superpositions, effacement…). De multiples combinaisons sont envisageables.

 

L’idée est  de créer une trame sonore cohérente avec le déroulé visuel de chaque vidéo pour une progression poétique et sensible d’une ambiance globale du projet. Cette cohérence portera le cheminement d’une intrigue et donnera tout son sens à cette installation vidéo.

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