Exposition personnelle, Espace Culturel du Bois Fleuri, Lormont (33)

Exposition du 11 septembre au 30 octobre 2021.

Titans n°5, dim. 130 cm x 170 cm, 2021
Titans n°5, dim. 130 cm x 170 cm, 2021

Exposition monographique des derniers travaux de l'artiste Laurent Valera à l'Espace Culturel du Bois Fleuri à Lormont.

Cette exposition est accompagnée d'un texte et d'un entretien avec la critique d'art Pauline Lisowski.

L'exposition se compose d'un ensemble de travaux d'encres sur papier et sur bois, d'une sculpture-installation de la série Lâcher la bride (avec le soutien de l'entreprise Grk Guareski) et d'une vidéo

d'animation, H-O-H, en collaboration avec la poétesse Frédérique Soumagne.

Un catalogue numérique de l'exposition est réalisé, conception et réalisation de Marie Bretaud.

Photos de l'exposition de Claire Soubrier.

 

La genèse de ce travail vient d'une réflexion de l'artiste Laurent Valera par rapport à la symétrie de la molécule d'eau H2O : H-O-H.

L'eau porte le vivant depuis plus de 3,5 milliards d'années. Les premiers éléments s'y son développés et combinés pour former des êtres de plus en plus complexe. Pour l'artiste, qui voit l'eau comme le chef d'orchestre du vivant, lui est apparût l'idée que le vivant se serait peut-être développé structurellement en symétrie, axe ou point, du fait qu'il baignait dans un élément lui même structuré en symétrie, deux atomes d'hydrogènes encadrant un atome d'oxygène, H-O-H.

L'ensemble du vivant de notre planète contient de l'eau et cet ensemble se développe en symétrie.

 

Entretien vidéo de Justine Adenis :



H-O-H, exposition personnelle de l'artiste Laurent Valera par Pauline Lisowski :

 

La vie de l’eau, sauvage et parfois contenue, maîtrisée est au cœur de la démarche artistique de Laurent Valera. L’artiste attentif à cet élément mouvant ressent le besoin d’un contact vivifiant pour en sentir l’énergie. Au grès de ses explorations, il prend soin de recueillir des matériaux et des éléments, traces des activités humaines et révèle de quelles façons l’eau transformée sert au quotidien. Explorant cette forme de vie, il développe un travail artistique en préservant des hasards contrôlés et se laisse surprendre par ce qui apparaît sur la feuille.


À l’occasion de cette exposition personnelle, il présente un ensemble d’œuvres sur papier ainsi que des sculptures-installations qui racontent l’eau tout en mettant en évidence ses formes et ses mouvements. Un motif apparaît de façon récurrente et témoigne de cet élément qui façonne les paysages.


Si l’eau peut nous échapper par sa puissance et ses résurgences, ses œuvres expriment les tensions entre concentration et expansion. L’artiste révèle ce qui n’est pas visible et dévoile l’arrière de ses œuvres tout en cherchant à montrer les effets, impacts de l’eau sur les matières. Au cœur de sa pratique artistique pluridisciplinaire se découvre sa quête d’équilibre entre les différents états de l’eau parfois calme ou dévastatrice. Ses œuvres témoignent de l’organisation du vivant par cet élément qui nous échappe alors que nous tentons de la domestiquer pour notre consommation.


L’artiste, à l’image de l’eau contenue dans des structures, canalisations et tuyaux, contraint ses encres par un voile très fin. Cette matière est alors concentrée dans des plis et crée des lignes comme celles de gravures. Ses œuvres suggèrent des formations de fossiles. Elles présentent l’effet de symétrie, en écho à celle de la molécule d’eau. Elles condensent également des strates de mémoire et s’apparentent à des palimpsestes. Laurent Valera laisse ainsi la place aux éléments naturels qui habituellement sont enfermés. Il exprime leur part d’énergie, leur puissance vitale.


Sur ses œuvres de petits formats, l’encre et l’eau glissent et passent à travers le papier, donnant naissance à des formes qui rappellent les tests de Rorschach. L’essence d’un paysage abstrait apparaît au verso. Le papier, comparable à une membrane organique, à une peau est alors lieu de passage d’un souffle. Les flux d’encres colorées qui le traversent renvoient aux veines et aux liquides présents dans notre corps humain. Ses œuvres ouvrent d’autres canaux de perception. Au-delà des remous de l’eau, des éclosions de pétales apparaissent.


Pour une autre série d’œuvres sur papier, l’artiste garde la trace du processus de fusion des encres sur le support. L’eau reste présente en dépôts et dessine un réseau. Elle est à la fois concentrée et tente de s’échapper des bords. Les deux facettes de cet élément naturel sont mises en évidence ; ses remous s’échappent tout en étant absorbés par la feuille de papier.


Les œuvres de Laurent Valera font également surgir des souvenirs d’émotions face au spectacle de l’eau, aux jaillissements et à la magie qu’elle provoque. L’eau traverse toute forme de vie, nécessaire à notre survie. Ses travaux sur papier attestent d’un aller-retour entre l’immensité de paysages aquatiques et des vues en gros plan de détails et fragments d’éléments naturels. Sur des grands formats, ses mouvements corporels font apparaître des formes colorées qui se déploient par endroit comme si elles allaient sortir de la surface du papier. Des entités qui alimentent la vie surgissent. Au-delà de l’eau, ce sont des phénomènes naturels grandissant qui apparaissent, mémoire de bouleversements et possibles naissances de paysages qui nous dépassent.


Des processus vitaux sont en germe dans l’exposition. Par endroit, des robinets assemblés entre eux font penser à des réseaux ou à des formes naturelles, végétales et animales. L’architecture du centre d’art semble être envahie par ces éléments dorés d’où pourraient couler de l’eau et ainsi poursuivre le processus à l’œuvre sur les grands papiers.


Au fond de la salle, sa vidéo captive notre regard et provoque l’impression d’être face à un phénomène qu’on ne peut maîtriser. Des écoulements d’eaux colorées mêlées à des encres procurent des effets hypnotiques entre fascination et sensation de trouble. Les flux recouvrent tout en se mélangeant, formant alors des phénomènes d’aspiration, de fusion qui semblent submerger un espace.  Les mécanismes de l’eau agissent et peuvent à la fois nous attirer, nous intriguer et nous effrayer.


Si elle donne la vie, l’eau peut aussi par son immensité être le lieu de la disparition. Elle est aujourd’hui un enjeu important qui nécessite qu’on préserve ses qualités naturelles et les territoires où elle vient à manquer. L’eau passe de corps en corps, de territoires en territoires, d’êtres vivants en êtres vivants et se nourrit de nutriments tout comme elle est une ressource pour chaque individu. Cet élément vital circule dans l’ensemble de l’œuvre de Laurent Valera.


Ainsi, telle une ode à la place de l’eau dans notre vie, son exposition condense plusieurs relations au temps, le lent écoulement des encres sur le papier qui laisse des traces, la rapidité de certains phénomènes naturels que l’artiste a observés ainsi que l’expérience physique de la marche, à l’affût des transformations dans le paysage. Les œuvres invitent à prendre différentes postures afin d’être à la fois proche et à distance de cet élément naturel fluctuant, à la fois calme et puissant.


Entretien avec Pauline Lisowski :

 

PL : Dans cette exposition, l’eau est au cœur de l’ensemble des œuvres réalisées à l’encre et d’une vidéo. Quel fut le point de départ de ton intérêt pour la vie de l’eau ?


LV : Le point de départ est la prise de conscience que tout ce qui vit sur notre planète contient de l’eau. Alors, comme je l’avais déjà imaginé avec la lumière, je l’ai perçu comme un élément reliant le vivant, comme le lien entre toute la vie terrestre. Je l’ai vu alors comme le point de départ du vivant, le portant et le traversant depuis des milliards d’années. Rapidement l’eau m’est apparue comme un élément vivant dont les qualités de vie, sa vigueur, est transmise aux êtres qui la consomment. Également, j’ai découvert les travaux de Jacques Benveniste sur la mémoire de l’eau, travaux repris par Luc Montagnier. L’eau aurait selon eux la capacité de mimer les propriétés des éléments avec lesquels elle serait en contact et d’agir comme eux durant un certain laps de temps. Cette théorie décriée par le monde scientifique m’a beaucoup inspirée et m’a conduit à produire plusieurs pièces dont la vidéo « Remember me ! ».


Les œuvres racontent cette fluidité d’une eau qui s’échappe, qui retrouve de la vigueur. Comment as-tu élaboré ton processus de création à partir de coulures d’encres colorées ?


J’ai voulu utiliser l’eau pour créer des propositions plastiques 2D. Il m’est apparu évident alors de la laisser maîtresse de ses actions, autonome. Pour moi elle est le chef d’orchestre du vivant, et comme tel c’est elle qui va me révéler ses envies et ses possibles. Pour cela j’ai instauré un protocole inspiré des conditions du développement du vivant au fil des millions d’années : l’eau sera au centre du processus, évoluant de ses aspirations propres dans un espace plan, contrainte d’éléments que j’aurais choisis en amont mimant les contraintes environnementales (apesanteur, conditions atmosphériques, pressions…). Le protocole alors mis en place je me lance dans une production. Au fur-et-à-mesure des formats les lignes peuvent bouger légèrement à l’image du développement du vivant qui mute et évolue générant des nuances et des tonalités différentes. Cela donne naissance à une série, à une famille de travaux. L’année suivante ou l’année d’après je reprendrai le travail d’ « aspirations d’eau » en modifiant le protocole de travail (changement des contraintes, nature des pigments, support…) et cela donnera naissance à une nouvelle famille de travaux.
Pour ce volet numéro V de la série Aspirations d’eau j’ai eu l’intuition de construire l’ensemble des œuvres de l’exposition en symétrie (les encres, la sculpture et la vidéo). La molécule d’eau, H2O, est une molécule en symétrie. Voyant l’eau comme le creuset du vivant et cela depuis des millions d’années, il m’est apparu évident que la structure du vivant de notre planète construite en symétrie au travers d’un axe ou d’un point de symétrie aurait été influencée par la structure en symétrie de la molécule d’eau. D’où le titre de l’exposition H-O-H.


Il y a dans l’exposition, une continuité entre les œuvres, chacune se répondant à l’autre comme si elles organisaient ensemble le cycle de cet élément naturel qui engendre la vie et contribue à la biodiversité. Comment travailles-tu les passages colorés sur les différents supports que tu utilises ?


Plus que la couleur c’est l’aspect graphique et leur construction en symétrie qui réunissent les œuvres entres elles. Cela naît directement du protocole mis en place dont je te parlais précédemment.
Pour les couleurs, chaque format est conditionné en amont, avant et lors de la mise en place de l’action. Le futur format est la résultante d’un état d’être au moment où je le fais, nourri des impressions lors du trajet pour l’atelier et de tout ce qui va précéder sa réalisation. Alors la préparation des couleurs en sera orientée.
Toute la mise en place de l’action fait partie du protocole, comme un rituel. Le changement de tenue, se déshabiller puis revêtir les vêtements de l’atelier, le positionnement du support et sa préparation, la pré-disposition du voile puis la préparation des couleurs. Tout cet enchaînement m’amène à entrer dans un état particulier de concentration. Alors je vais pouvoir investir le support. À ce moment-là je pense être dans un état de transe. J’ai ressenti fortement sur la réalisation de la famille des formats « Titans » une connexion à quelque chose de puissant amenant mon attention à posteriori sur une rivière au nord-ouest des États-Unis, la rivière Hoh, prenant sa source sur le mont Olympe. Ce qui est surprenant c’est que l’idée d’appeler l’exposition au Centre Culturel du Bois Fleuri à Lormont H-O-H est venue bien en amont de la réalisation de ces travaux et de la découverte de cette rivière.


Quelles sensations as-tu voulu restituer au sein de cette exposition ?


L’idée est de rentrer dans un univers immersif qui traduirait les débuts de la construction du monde vivant, un peu comme une entrée dans un sanctuaire. La salle est plongée dans la pénombre, les éclairages sont tamisés, focalisés sur les œuvres. La vidéo qui se joue sur le fond de la salle active l’ensemble de l’exposition. L’ambiance sonore qui est un texte lu résonne dans l’espace tel un oracle ordonnant et organisant le vivant du monde. Ce texte, de et lu par Frédérique Soumagne amène une tension dans l’espace. L’ensemble met en éveil et sollicite l’attention.


Il y a une sorte d’alchimie entre le voile et l’encre. Dans tes œuvres, la couleur vibre et évoque des métamorphoses au sein des paysages naturelles. Quelles expériences physiques et phénomènes naturels t’ont amené à élaborer ton processus de travail artistique ?


Clairement le phénomène essentiel est la combinaison et l’association des éléments qui génèrent ainsi la vie. L’eau est le creuset dans lequel ces combinaisons ont pu s’établir. Elle est pour moi le contenant, le réceptacle sans lequel l’alchimie de la vie ne peut se faire. Tout dans le travail n’est qu’association et propositions construites qui en résultent. Dans la vidéo c’est flagrant, les propositions se font en live, au fur-et-à-mesure et dans une continuité qui pourrait être infinie.
Sur les formats en papier ou en bois, on a l’impression que le travail d’association et de combinaison est toujours en cours, en mouvement. La fusion des éléments, les flux des respirations, les liquides qui se répandent, tout est en train de participer à l’élaboration de la vie.


Le robinet est devenu un élément de construction d’un vortex. Il suggère une molécule qui rappelle aussi le système d’organisation des canalisations de l’eau. Comment as-tu pensé le développement de cette sculpture-installation dans l’espace ? Comment vois-tu le futur de cette œuvre en devenir ?


Oui les deux chaînes de robinets forment la dynamique du mouvement d’un vortex. Ces deux chaînes évoquent également les deux brins de la double hélice d’Adn.
Cette structure s’inscrit dans un travail appelé « Lâche la bride » dans lequel j’imagine que l’eau se libère de ses contraintes domestiques et industrielles. Comme si elle se libérerait de ses entraves que sont les réseaux, les canalisations, la robinetterie et la chimie qui l’endorment et la bloquent. Comme si elle se ré-ensauvageait. Je la vois comme un organisme vivant que l’on aurait domestiqué et maltraité. Ainsi nous l’affaiblissons et nous éliminons ses capacités de vie et surtout ses capacités à donner la vie.


La vidéo offre des entrées pour comprendre les familles d’œuvres ici exposées. Il y a de nombreuses tensions entre force et transformations plus lentes. N’y-a-t-il pas en cette œuvre la possibilité de prendre le temps de contempler le spectacle de fluides aussi bien extérieurs qu’intérieurs ?


Oui c’est ça. Assister en directe et en continu à la création du vivant, à ses flux internes et externes qui donnent la vie. Cette vidéo est construite en symétrie parfaite, les écoulements de l’eau et des encres se faisant dans un effet miroir. Elle en devient de ce fait fascinante et hypnotique. Nous restons accrochés à l’image dans l’attente perpétuelle des propositions symétriques en devenir. Les écoulements donnent lieu immédiatement à des interprétations visuelles organiques et vivantes, à des corps humains ou d’animaux… Tout cela naît du simple fait que l’ensemble s’organise en symétrie. Nous possédons des capacités innées à identifier la symétrie dans les espaces dans lesquels nous évoluons pour diverses raisons : suite à des questions d’adaptabilité pour notre survie comme pour des questions purement esthétiques. Les recherches sur ces questions n’ont pas encore tout révélées sur les raisons de notre fascination pour la symétrie.


La mouvance de l’élément eau est révélée. Quel lien opères-tu avec ton questionnement sur le souffle ?


Effectivement je vois un lien fort voir une similitude entre les flux d’eau et la respiration et plus particulièrement avec le souffle. Donner la vie par un souffle ou manifester de la naissance par une première respiration. La respiration est à l’origine de toute la vie. J’ai lu un article il y a quelques mois de la philosophe Luce Hirigaray qui a été comme une révélation pour moi. Ses mots sur le souffle et les sens qu’elle identifie comme tous faisant appel au sens du toucher confirmaient mon ressenti qui me guide pour la réalisation de mes travaux.
Dans le ventre de notre mère nous avons « respiré » le liquide amniotique. Peut-être la forme de nos poumons en est la résultante : ils ont l’aspect de chenaux arborescents comme ceux du bassin d’Arcachon à marée basse par exemple.
J’aime associer l’image du mouvement de l’eau sur la plage après l’écrasement d’une vague à une respiration : un premier mouvement d’eau qui monte sur la plage de sable illustre l’expire, que j’associerais à un don, puis l’eau s’en retourne à sa source comme une inspire que je rapprocherai du geste de ramener à soi, de prendre ou de se nourrir.
J’ai envie aussi d’associer la respiration à un organe emblématique du vivant : le cœur. Cet organe est premier dans l’organisation d’un corps qui se construit. C’est entre autres une pompe qui en deux temps, comme une respiration, impulse le flux de vie dans le corps.


Tu t’investis au sein du Spectacle Souffles dans lequel un voile s’apparente à un grand corps avec lequel trois danseurs entrent en relation. De quelle façon l’art vivant te permet d’interroger l’art visuel ?


C’est pour moi une autre manière d’illustrer le propos que je porte depuis plusieurs années sur le vivant et plus particulièrement sur le lien inter vivant incarné par l’élément eau. Le spectacle Souffles est le développement dynamique et en devenir de mes propositions d’art visuel. Ici le voile incarne une surface d’eau verticale flottant dans l’espace. Il s’active et se charge des flux d’air du lieu et de ceux générés par les danseurs. Comme pour l’exposition H-O-H la pièce symbolise l’organisation du vivant dans une action qui s’accélère et s’intensifie. En 20 minutes les danseurs avec le voile enchaînent une infinité de possibles proposant en forme performative des combinaisons des éléments du vivant afin de donner une profusion de formes à la vie.
Le voile rend matériel le souffle de vie du lieu et de ce qui s’y joue en permanence. Chaque action de l’environnement comme celles des danseurs nourrissent le voile qui est comme un prolongement et une fusion de leurs actions. Les flux du voile impactent aussi la danse et influent sur les propositions des corps. S’instaure un échange, un dialogue entre l’ensemble des acteurs, comme une respiration commune.
En même temps le voile peut être perçu comme une contrainte pour les danseurs, comme une membrane qui étouffe le plein développement de leurs aspirations à la vie. Peu à peu et au fur-et-à-mesure de la pièce l’intégrité du voile est malmenée, il est lacéré par les actions des danseurs et de leurs mouvements comme pour s’en libérer et retrouver le souffle.
Je crois que la confrontation à d’autres champs des arts avec l’ensemble des éléments qui les composent me fait mûrir et nourrit mon travail et mes propositions. Cela ouvre le champ des possibles. En même temps cela accentue le besoin et certainement l’intensité de se retrouver seul à expérimenter dans l’atelier. Finalement j’aime la combinaison de ces deux postures, cette alternance.


Comment ce spectacle t’amène-t-il à expérimenter l’influence des phénomènes naturels sur la création artistique ?


Le voile qui est le cœur de la pièce Souffles est un baromètre des phénomènes naturels du lieu où la pièce est jouée. Il incarne par ses propositions de mouvements les flux qui traversent l’espace de l’infime brise à la grosse rafale. Il rend visible l’invisible des flux d’air. Une des belles surprises est la mise en présence des courants d’air thermiques générés par les corps. Effectivement même sans bouger les corps dégagent de la chaleur impulsant un courant d’air ascendant qui fait s’envoler le voile.
Intégrer et accepter la présence des phénomènes naturels m’aide à lâcher prise et à passer des caps. Effectivement ils imposent leurs rythmes et leurs possibles sur lesquels je n’ai aucune prise. En amont j’essaye de dimensionner les projets en projetant leurs actions mais la surprise est toujours présente et je m’en réjouie. Je sens bien que cela m’aide à grandir.


Comment penses-tu la suite de ce travail artistique axé sur la question de l’eau sous toutes ses formes ?


Je vais continuer à faire évoluer la série Aspirations d’eau et développer de nouvelles familles d’œuvres.
Dans l’immédiat je vais réaliser des encres comme pour celles réalisées en recto/verso mais sur des formats papier beaucoup plus grands, de la dimension des Titans, environs 130 cm par 170 cm. Effectivement dans ce process par diffusion de l’eau colorée au travers du papier celui-ci devient une membrane sur laquelle l’eau révèle des nuances et des formes organiques qui me fascinent.
J’ai l’envie de poursuivre la série « Lâcher la bride » avec les robinets en laiton doré avec l’idée de l’intégrer à des fontaines. L’eau va habiter et dynamiser ces réseaux de robinets. L’ensemble, baroque, se déploierait au-dessus de bassins, vivant et crachant l’eau et sa magie.

Extrait de la vidéo H-O-H.