" Faites du jeans ", travaux de Laurent Valera pour l'exposition Collective Belvès 2016-2017

Exposition collective de juin 2016 à juin 2017.

Artistes : Nicolas Bazes, Michel Brand, Eltono, Louis Lambert 3ttman, Laurent Valera

 

Laurent Valera propose pour cette exposition un travail et une réflexion sur la production de masse du blue jeans. Sa production mondialisée est critiquée sur le plan éthique et environnemental.

 

A 10km de Belvès une usine de jeans, Rosa Rosam (ex-Teton) a fermé ses portes il y a 5 ans. Une soixantaine de salariées se sont retrouvées du jour au lendemain sans emploi dont des belvèsoises. Certaines y travaillaient depuis plus de 30 ans.

 

La rencontre avec l'une d'elles - Maria, spécialisait dans la confection des poches arrières des jeans pendant 36 ans - lors de l'accrochage de l'oeuvre "Faites du jeans" sur le mur de sa maison a profondément marqué l'artiste. 

 

Ce travail fait également écho à cette catastrophe économique et humaine du pays de Belvès.

" 11m3 = 1BJ ", installation, Laurent Valera, 2016 :

A l’image d’un jardin zen japonais des ilots de jeans émergent d’un océan de gravier.

 

La production industrielle des jeans est très consommatrice en eau. Il faut en moyenne 11m3 (11000 litres) d’eau pour en réaliser un seul !

 

Laurent Valera matérialise ici cette quantité d’eau au travers de ces trois volumes de jeans disposés dans ce jardin sec.

 

" 11m3=1BJ ", installation de Laurent Valera, Belvès, 2016
" 11m3=1BJ ", installation de Laurent Valera, Belvès, 2016
11m3 = 1 BJ, Laurent Valera, 2016. En arrière plan peinture de Eltono.
11m3 = 1 BJ, Laurent Valera, 2016. En arrière plan peinture de Eltono.

" A elephant in the room ", installation, Laurent Valera, 2016 :

En Angleterre l'expression "A elephant in the room" signifie un sujet dont tout le monde est au courant et dont personne ne souhaite parler. La fermeture de l'usine de jeans Rosa Rosam de Saint Cyprien est un de ces sujets.

Un étrange scolopendre investit la rue Foncastel. Il semble remonter des confins du village afin d'en gagner le coeur : la halle du marché.

Métaphore d'une industrie textile mondialisée, forte, lourde et sans scrupule, qui avance inexorablement en écrasant tout sur son passage.

A elephant in the room, 2016
A elephant in the room, 2016

" Ateliers de poche ", installation, Laurent Valera, 2016 :

 

Située rue Merdanson, cette installation fait référence aux petits ateliers clandestins de confection textile.

 

Accrochés sous le planché d'un immeuble qui surplombe cette rue, vouée au moyen âge aux rejets des ordures, des hauts de jeans laissent pendre leurs poches retournées, vides.

 

Exploitation, clandestinité, pauvreté, voilà à quoi en est réduite cette main d’œuvre de nos vêtements bons marchés.

 

Ateliers de poche, 2016
Ateliers de poche, 2016

Faites du jeans, installation, Laurent Valera, 2016 :

 

Quelle est donc la fête qui se prépare rue du Verdier ?

 

D’étranges fanions en poches arrières de jeans sont suspendus dans la rue. Ils sont tachés de rouge.

 

A Saint Cyprien (commune à 10km de Belvès) une usine de jeans fonctionnait depuis plus de 50 ans. Suite au rachat de cette usine par un investisseur russe et à sa liquidation il y a 5 ans pour la délocaliser à l’étranger plus de 60 salariés se sont retrouvés du jour au lendemain sans emploi. Certains y travaillaient depuis plus de 30 ans.

 

Des belvèsoises, dont Maria qui habite cette rue et qui était spécialisée dans la confection des poches de jeans, tentent encore, 5 ans après, de reconstruire leur vie.

 

Faites du jeans, 2016
Faites du jeans, 2016

Ascension, installation, Laurent Valera, 2016 :

 

Est-ce une descente d'eau ? Non, un arbre mort ! Il porte une multitude de poches de jeans. Ces poches contiennent du sable et ces poches saignent.

 

Sablage des jeans par des ouvriers dans des conditions rudimentaires en Turquie, consommation d'eau titanesque (assèchement de la mer d'Aral pour la culture du coton...) : le jeans mondialisé tue !

 

 

Ascension, 2016
Ascension, 2016

Le jeans est devenu un des emblèmes de la société de consommation actuelle. Il est présent sur toute la planète et dans toutes les catégories sociales.

 

Sa production, est elle aussi mondialisée, et critiquée sur le plan éthique et environnemental.

Selon l’Agence française de l’environnement (Ademe) , 52 % des impacts environnementaux d’un jeans sont générés lors de sa production.

 

En premier lieu, la culture du coton, qui occupe 2,5 % de la surface de la planète, consomme 25 % des insecticides et 11 % des pesticides utilisés dans le monde. Afin d’accélérer l’ouverture des capsules de coton, l’utilisation de défoliants (arsenic, composés organophosphatés) est fréquente. Par ailleurs, le cotonnier est très gourmand en eau. On attribue d’ailleurs à cette culture la disparition progressive de la Mer d’Aral car c’est là que se trouvent 73% du coton mondial irrigué. Or, les fleuves qui alimentaient cette mer ont été détournés vers les cultures de coton. Si on fait le compte pour 1kg de coton (c’est-à-dire pour un jeans), ce sont 5000 à 25000 litres d’eau, 75g de pesticides et 2 kg d’engrais chimiques qui sont utilisés. Et ce n’est pas fini…

 

Vient ensuite la phase d’ennoblissement qui correspond à l’ensemble des traitements subis par le coton pour devenir du fil puis du denim (teinture, imperméabilisation, traitement anti-rétrécissement…). Pour cela on utilise des résines synthétiques toxiques (contenant par exemple du formaldéhyde pour la résistance au froissement). Outre les dangers que cela représente pour les travailleurs, si le pantalon est produit dans un pays ne disposant d'aucune législation sur le traitement des eaux cela peut avoir des conséquences irréversibles pour l’environnement. Or, la majorité du marché textile est issue de l’importation qui ne respecte pas les normes européennes.

 

De plus, selon le ministère français de l’industrie, l’ennoblissement correspond à 65% de l’énergie consommée (eau et électricité) par an pour la filière textile.

De la culture du coton jusqu’à son acheminement en Europe en passant par sa confection, un jeans aura consommé l’équivalent de 25 litres de pétrole et engendré un rejet de 2 kg éqCO2 (2) dans l’atmosphère (Ademe).